Travail et Politique
Agir sur le rapport entre travail et politique
Créée à l’initiative de professionnels, d’ergonomes, de philosophes, d’intervenants, de représentants syndicaux, représentants politiques, et de chercheurs tous particulièrement préoccupés par la relative absence de la question du travail dans le débat public et parmi les préoccupations des politiques, l’association Travail et Politique a pour objet de contribuer à tisser les liens intellectuels et pratiques entre travail, débat public et action politique.
La création de cette association est motivée par l’idée selon laquelle, le travail – considéré comme une activité créatrice de valeur et potentiellement émancipatrice – occupe une place centrale dans nos sociétés, bien que celle-ci ait été obscurcie par trois grands phénomènes ayant conjugué leurs effets depuis le début des années 1980 :
- La diffusion d’une idéologie de la « fin du travail » ;
- La prééminence de la place de l’emploi dans le dialogue social et le débat public ;
- La place prépondérante prise par les approches gestionnaires.
Depuis peu, la question du travail redevient d’actualité. De nombreux évènements, parfois dramatiques concernant les risques professionnels, notamment les risques psychosociaux et les atteintes à la santé physique et mentale, ont pris une importance grandissante dont les médias se font l’écho. Ils contraignent les pouvoirs publics et les différentes parties prenantes de la vie au travail à rechercher des réponses et des mesures ; leurs fondements semblent encore bien fragiles et sans réelle capacité à prendre en compte les relations entre santé, travail et création de valeur.
Cela tient, de notre point de vue, à l’absence de reconnaissance du caractère incontournable de la « centralité du travail », alors même que le travail structure la personnalité et l’identité de chacun, conditionne les relations entre les groupes sociaux, détermine les conditions concrètes à partir desquelles la valeur est produite.
Les mutations structurelles de ces trente dernières années ont profondément affecté le travail et déstabilisé les repères issus de l’ère industrielle et du fordisme. Ces mutations provoquent un approfondissement de l’écart entre ce qui est prescrit par la hiérarchie et l’organisation d’un côté ; la réalité que les salariés sont amenés à prendre en charge, de l’autre. Le travail réel des salariés (en situation d’exécution comme d’encadrement) les engage à réaliser régulièrement des arbitrages mobilisant des réflexions quant à ce qu’il est juste de faire ou de ne pas faire, à initier des discussions concernant l’élaboration de nouvelles règles de métier, voire de doctrines, qui ont un impact sur leurs cadres d’action. Le caractère stratégique de ces activités déontiques et les conditions sociales de leur déploiement sont en lien direct avec l’espace du politique. Elles sont associées à l’émergence de nouvelles formes de conscience et de nouvelles formes de pensées relevant du « vivre ensemble », c’est-à-dire du politique.
Ces transformations invitent à suivre deux angles d’analyse pour instruire le rapport entre travail et politique :
- l’évolution du travail en tant que tel suscite l’émergence de nouveaux dispositifs institués de régulation, de portée politique;
- certains grands enjeux sociétaux à partir desquels se structurent, actuellement le débat et l’action politiques, ont des liens avec le travail. Ces derniers méritent d’être explicités.
L’émergence de nouveaux dispositifs institutionnels concerne notamment l’évaluation du travail en tant qu’activité créatrice de valeur. Les démarches d’évaluation individuelle de la performance cassent les dynamiques de coopération dans le travail, isolent les salariés dans des périmètres d’activité cloisonnés, éloignent le management des processus de reconnaissance du travail réel. Cela se retourne tant contre la santé des salariés que contre la performance effective des organisations.
Ces impasses ont une dimension sociétale au-delà de leur dimension entrepreneuriale. En sortir suppose d’innover et d’élaborer de nouveaux dispositifs d’évaluation des conditions dans lesquelles opèrent les différentes formes de la coopération horizontale, entre pairs ; verticale avec la hiérarchie ; transverse avec les bénéficiaires des services. Encore faut-il disposer de doctrines et de formes de pensée qui prennent appui sur les sciences du travail.
Certaines grandes questions de société sont trop souvent traitées sans référence ou sans lien établi avec l’évolution du travail. C’est le cas de la création d’emplois pensée indépendamment des conditions d’exercice de l’activité et de la qualité du travail ou de la nature des compétences requises. Le lien n’est pas suffisamment fait entre les modalités d’organisation du travail et la façon dont sont appréhendées les dépenses relevant de la sécurité sociale et de la santé. La sécurité et la violence dans la société, les enjeux de la détérioration de l’environnement n’intègrent pas assez les conditions de mobilisation des salariés au travail.
Dans quelle mesure est-il possible d’introduire le travail dans la façon de prendre en considération ces enjeux ? Il y a là une manière renouvelée de faire de la politique et de débattre des questions de société en s’appuyant sur l’expérience de travail des citoyens. De cette première série de questionnements émerge le besoin d’interroger les responsables politiques et syndicaux sur leur propre travail car :
- leur activité relève d’un travail;
- ce travail a une incidence sur le rapport que ces responsables construisent entre travail et politique ;
- l’analyse du travail constitue une voie pour renouveler les pratiques politiques.
Au final, nous avançons l’idée selon laquelle : le travail, comme expérience partagée, est susceptible de redonner du corps à la pratique de la démocratie.
L’articulation de ces différents angles d’analyse constitue le socle à partir duquel les rapports entre travail et politique sont susceptibles d’être repensés à l’aide de réflexions, d’initiatives et d’actions que souhaite mener l’association.
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